dimanche 27 février 2011

ESSENTIAL KILLING * (en avant-première)

Sortie : 6 avril 2011
De : Jerzy Skolimowski
Avec : Vincent Gallo, Emmanuelle Seigner…

Koh Lanta à la neige

Ça commençait pourtant si bien. Un Afghan, capturé par des soldats américains, est violemment interrogé et torturé. Il est ensuite transporté en Europe centrale. Lors de son transfert, il profite d’un accident de la route pour s’enfuir. Isolé dans une forêt enneigée, loin du désert qu’il connaît, il tente de survivre dans des conditions extrêmes et tue quiconque, se dresse sur son chemin.
Les Américains à ses trousses, l’action ne devrait plus tarder. C’était sans compter sur une bande annonce mensongère qui nous vend du rêve. Loin du survival annoncé, « Essential Killing » n’est que la fuite d’un dangereux taliban que les G.I. perdent dès la première demi-heure. Dès le début du film, on expédie une potentielle dénonciation des dérives de l’armée américaine et une confrontation entre l’anti-héros afghan et ces derniers. Puis rapidement, on sombre dans une profonde torpeur. Car concrètement il ne se passe rien.
Après avoir failli s’endormir deux fois et regardé sa montre trois, on hésite à partir mais sait-on jamais, le meilleur est peut être pour la fin. Emmanuelle Seigner, deuxième nom au générique, fait enfin son apparition… à quinze minutes de la fin. Nouvelle déception. Une rencontre plus en amont aurait su nous tenir éveillé.
Seul la performance de Vincent Gallo évite au film un zéro pointé. On ne peut qu’admirer sa dévotion et sa force de travail. Voir Gallo se nourrir d’insectes, de poisson cru encore vivant, et marcher des heures durant pieds nus dans un froid glacial, force le respect. Présent dans chaque scène, il n’a pas démérité son prix d’interprétation masculine à la dernière Mostra de Venise. Le jury s’est par contre un peu emporté en offrant au film le Prix spécial du jury. Car Gallo a beau nous impressionner à jouer les Robinson Crusoé version homme des forêts, on s’ennuie ferme.
Outre la lassitude, le personnage qu’il interprète, est désespérément seul et antipathique. Les Américains disparus, il ne croise que de rares paysans slaves. Ces derniers ne représentent pas un danger immédiat pour lui mais il préfère tout de même s’en débarrasser. Son instinct de survie frôle alors l’absurde.
Une fois qu’on a compris qu’on ne tirerait rien du fond, on tente de se raccrocher à la forme. Peine perdue. Le même sapin enneigé semble être filmé tout du long. On tourne vite en rond. Même le sang qui vient souiller la neige immaculée* nous laisse de marbre.
Jerzy Skolimowski, cinéaste polonais, avait pour pari de réaliser une chasse à l’homme dénuée de tout jugement. Si on est bien dépourvu d’opinion, on repassera pour la chasse à l’homme. C’est sympa le cinéma concept mais c’est encore plus sympa quand il s’y passe quelque chose…

*Le sang sur la neige est un thème littéraire connu. Chrétien de Troyes y consacre tout un passage dans « Perceval, le Gallois » tandis que Jean Giono s’en inspire dans « Un roi sans divertissement ».

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